Lorsque la vue de Kasongo Mwenze devient floue, sa vie est totalement chamboulée. Cet agriculteur de 31 ans vit à Mushimba, un village situé à quelque 80 km de Kolwezi. En quelques mois, il devient complètement aveugle à cause d’une cataracte bilatérale. Il ne peut plus travailler sa terre et subvenir aux besoins de sa famille. Pire encore, les villageois sont convaincus que sa cécité est due à l’influence d’esprits maléfiques et la sorcellerie. Comme il ne peut plus s’occuper de sa famille, sa femme le quitte, emmène ses quatre enfants et, en désespoir de cause, se réfugie en Zambie, pays voisin de la RDC.
Heureusement pour lui, peu de temps après, une clinique mobile du centre de santé le plus proche rend visite à son village. L’équipe réfère Kasongo à la clinique ophtalmologique de Kolwezi, fondée par Lumière pour le Monde en 2016 en collaboration avec un partenaire local. L’ONG soutient la clinique depuis lors afin qu’un maximum de personnes puissent avoir accès à des soins oculaires de qualité.
Quelques jours et deux opérations plus tard, Kasongo a retrouvé la vue. « Ils se sont très bien occupés de moi ici à Mwangaza, » se réjouit-il. Enthousiaste, il retourne dans son village. Maintenant qu’il a retrouvé une bonne vue, il peut recommencer à travailler sa terre, prendre soin de ses animaux et acheter des légumes.
Aucune hésitation possible
Peu de temps après, son père Kyembe Mwenze souffre, lui aussi, de problèmes de vue. À son tour, il devient complètement aveugle en quelques mois. Kasongo n’hésite pas un seul instant : « J’ai immédiatement vendu une chèvre pour payer notre trajet. Il nous a fallu plus de 16 heures pour arriver à Kolwezi et, de plus, nous sommes tombés en panne en chemin. J’ai dû passer la nuit en bordure de route avec mon père aveugle, mais je n’avais qu’une idée en tête : conduire mon père à la clinique. »
À son retour au village après ses opérations, Kasongo a constaté que les villageois le regardaient avec méfiance. « Ils étaient convaincus que la malédiction était toujours présente. » Lui, il ne croit pas en ces récits de sorcellerie. « Pour moi, les choses sont claires : la cataracte est une maladie qui peut être traitée, » explique-t-il. « Maintenant que mon père est aveugle à son tour, la réaction des villageois était prévisible : comme j’ai retrouvé la vue, la malédiction aurait tout simplement été transmise à mon père. Qu’ils pensent ce qu’ils veulent… Moi, je ne me fais aucun souci. Je suis bien placé pour savoir ce que l’équipe médicale de la clinique est capable de faire et me réjouis déjà de ramener mon père au village quand il aura retrouvé la vue et pourra reconnaître tous nos voisins. »
En attendant la réouverture du bloc opératoire
Malheureusement, des travaux de rénovation sont en cours à la clinique Mwangaza lorsque père et fils y arrivent après un long voyage épuisant. Il leur est conseillé de rentrer chez eux car le bloc opératoire ne sera à nouveau opérationnel que dans quelques semaines. Alors seulement, Kyembe pourra être soigné.
« Pas question, » s’écrie Kasongo. « Nous venons d’arriver et nous allons rester ici. » Il vend alors quelques poules qu’il avait emportées avec lui au marché de Kolwezi. Avec cet argent, il peut acheter de la nourriture pour son père alors qu’ils logent dans la salle des malades de la clinique en attendant la réouverture du bloc opératoire.
Le Dr Socrate Kapalu confirme que Kyembe souffre, lui aussi, d’une cataracte aux deux yeux. Le vieil homme n’a pas peur de l’opération. « Je veux tout simplement guérir, retrouver la vue, » dit-il avec conviction. « Je veux retourner dans mon village et redevenir autonome. »
Une opération de la cataracte salvatrice
Le jour suivant, Kyembe se dirige lentement vers la table d’opération au bras d’une infirmière. Moins de quinze minutes plus tard, le Dr Socrate retire une petite masse de couleur caramel de l’œil du patient : le cristallin opacifié de Kyembe. Pas étonnant qu’il ne voyait plus rien. Le médecin remplace le cristallin par une lentille artificielle et le tour est joué ! « Il verra déjà beaucoup mieux demain, » explique l’ophtalmologue, « mais il faudra quelques jours pour que sa vue retrouve toute son acuité. Il doit s’habituer à la nouvelle lentille. »
Le lendemain, Kyembe Mwenze a l’air calme. Une infirmière retire doucement son pansement oculaire et teste sa vue. La première partie de l’examen se déroule très bien : il compte sans problème les doigts qu’elle lui montre. Un test plus détaillé est un peu plus compliqué, mais sa vue deviendra de moins en moins trouble au cours des jours suivants, jusqu’à devenir parfaite.
Dans un coin du local de consultation, Kasongo rayonne de joie. Il y a moins de six mois, il se trouvait ici, à la place de son père, dans la tenue bleue typique du bloc opératoire, réapprenant à découvrir le monde. Leurs regards se croisent et un sourire lumineux apparaît sur le visage du père et du fils.
De l’espoir en l’avenir
Le lendemain, le Dr Socrate opère le second œil de Kyembe. Son fils Kasongo garde foi en l’avenir. « J’ai retrouvé la vue tout comme mon père et j’ai pu prendre contact avec ma famille. Je vais tout d’abord ramener mon père à la maison et, ensuite, je vais récupérer ma famille en Zambie. Maintenant que je ne suis plus aveugle, je peux subvenir à leurs besoins et nous allons à nouveau former une vraie famille. »
Le récit de Kyembe et Kasongo est plein d’espoir. Grâce aux soins oculaires de qualité dispensés dans la région avec le soutien de Lumière pour le Monde, le père et le fils ne vivent plus dans les ténèbres. Aidez-nous à continuer notre travail, faites un don aujourd’hui encore. Avec 52 euros, vous rendez la vue à un adulte. Chaque contribution compte. |
Photos : Anneleen van Kuyck
Photos de Kasongo avant et après opération : Jorgo Kokkinidis