Le braille : une porte ouverte sur le monde

    2012 : Agnès est aveugle et se rend à l’école avec des enfants voyants de son âge.
    Kilosa, Tanzanie – Agnès est une petite fille timide de 9 ans. Elle est aveugle à cause d’un glaucome. Une pression intraoculaire trop élevée dans ses deux yeux a endommagé ses nerfs optiques et l’a rendue aveugle.

    Agnès est scolarisée à l’école Mazinyungu à Kilosa, dans la province de Morogoro. Il s’agit d’une école ‘régulière’ qui compte un millier d’élèves voyants. Elle comporte également un internat qui accueille environ 60 élèves aveugles et malvoyants pendant l’année scolaire. Durant les deux premières années, les élèves atteints de déficience visuelle suivent les cours en petits groupes parce qu’ils doivent apprendre à perfectionner une série d’aptitudes spécifiques. Des enseignants spécialisés leur apprennent à lire et écrire en braille, leur donnent une formation en « mobilité et orientation », notamment sur l’utilisation de la canne blanche pour se déplacer dans l’espace de l’école,… Ils se familiarisent aussi avec une série d’activités journalières, comme laver leurs vêtements, afin de pouvoir vivre une vie autonome plus tard.

    Apprendre à écrire avec un poinçon

    Après ces deux années préparatoires, les groupes fusionnent et les élèves aveugles et malvoyants suivent les cours avec des élèves voyants de leur âge. Agnès est en deuxième année préparatoire. Pour des enfants complètement aveugles comme Agnès, l’alphabétisation passe par l’apprentissage du braille, qui est l’unique outil leur permettant de maîtriser l’écriture. Le braille est un système d’écriture tactile à points saillants : des lettres, chiffres et symboles que les élèves lisent avec les doigts. Dans de nombreux pays en développement comme la Tanzanie, les élèves apprennent encore à écrire en braille en utilisant une tablette qu’ils « piquent » avec un poinçon pour former des points.

    L’un des professeurs d’Agnès est très fier de la fillette : « Elle apprend vite et obtient de bons résultats. Apprendre le braille requiert beaucoup de pratique. Identifier les lettres est relativement facile mais, au début, lire des mots entiers demande beaucoup d’efforts. La sensibilité du bout des doigts joue aussi un rôle. Agnès se débrouille très bien et fait de grands progrès. Visiblement, elle aime beaucoup la vie scolaire. »

    Écrire en braille a ouvert de nouveaux horizons à la fillette. Elle possède maintenant les compétences nécessaires pour chercher des informations, les traiter et les utiliser de manière ciblée. L’alphabétisation est la clé du développement personnel, d’une bonne formation, d’un emploi, de l’intégration et de la participation à la vie de la communauté.

    Dieter Telemans

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Photo : Dieter Telemans. Agnès apprend à écrire en alphabet braille sur sa tablette : de droite à gauche, en « piquant » le papier avec un poinçon. Ensuite, il faut retourner la feuille pour lire les points avec les doigts.

     

     

     

     

     

    Agnès à l’internat, dans la chambre qu’elle partage avec trois autres élèves atteints de déficience visuelle. Elle nous montre qu’elle est parfaitement capable de laver ses vêtements.

    2018 : Agnès s’est complètement épanouie  

    Kilosa, Tanzanie – Agnès a 14 ans et est en septième et dernière année d’école primaire. La fillette apparaît sans aucun doute épanouie. Elle traverse le terrain de l’école d’un pas assuré et discute à bâtons rompus avec ses amies. Certaines sont aveugles comme elle, d’autres n’ont aucun problème de vue.
    Entre-temps, elle a acquis des responsabilités à l’internat : « Je m’occupe de quatre petites filles. Je les aide à s’habiller, à prendre soin d’elles-mêmes, je les choie un peu pour qu’elles se sentent chez elles ici. Je me souviens combien les premières semaines à l’école étaient difficiles. »

    L’adolescente aime toujours suivre les cours. L’anglais, la géographie et le swahili sont ses matières préférées. « Je voudrais devenir enseignante pour les enfants qui, comme moi, ont des problèmes oculaires », raconte-t-elle avec conviction.

    Agnès est une élève d’exception à l’école Mazinyungu, mais elle a encore d’autres centres d’intérêt : « J’aime beaucoup chanter et, avec mes amies de l’internat, nous chantons et dansons souvent le soir. » Elle est aussi une joueuse accomplie de « goalball ». Il s’agit un jeu spécifiquement développé pour les personnes avec déficience visuelle. Lumière pour le Monde a aménagé un terrain de goalball à l’école Mazinyungu en 2016 que les élèves utilisent bien sûr régulièrement. L’école a quelques joueurs de talent, parmi lesquels Agnès, et son équipe a déjà battu plusieurs autres équipes.

    Photos : Raymond Kasoga.
    Lien, collaboratrice de Lumière pour le Monde et Agnès se connaissent depuis 2012.
    « La petite fille timide et craintive est devenue une adolescente sûre d’elle-même. Elle sait clairement ce qu’elle veut faire de son avenir. Son évolution fait chaud au cœur. »

     

     

     

     

     

    2020 : Agnès a passé les examens nationaux avec brio et poursuivra sa scolarité en janvier à l’école secondaire de Lugalo, dans la région d’Iringa. Bon courage, Agnès !

    Vous pouvez vous aussi soutenir nos projets d’éducation en Afrique ! Grâce à un don mensuel de 20 euros, vous permettez à un enfant atteint de déficience visuelle d’aller à l’école. Faites un don.